"Mon Bataclan", de Fred Dewilde

Edition: Lemieux éditeur

Sortie: Novembre 2016

48 pages

"Je débite le même récit en boucle, tout ce que l'on peut me dire, je le ramène à l'attentat, comme un vieux machin qui raconterait la guerre de 39-40 parce que sa femme lui a dit qu'il n'y a plus de café."

Je ne lis que très rarement de bandes dessinées. J'en empruntais petite, à la bibliothèque; mais je préfère les romans, et on ne peut pas tout lire!
Je ne sais pas si on peut vraiment qualifier "Mon Bataclan" de bande dessinée. En réalité, c'est un témoignage. Un témoignage qu'il est très, très difficile de juger et de chroniquer pour la simple et bonne raison que l'on ne peut pas juger un si bel album né après l'horreur.

"Étrangement, j'ai le sentiment d'avoir eu plus peur après que pendant. Pendant, on est dans le vivre, la peur n'a plus sa place. La peur c'est la panique, la perte de contrôle, la mort. Je ne prétends pas ne pas avoir eu peur, je pense juste que l'adrénaline a contenu cette peur."

Je trouve cela tellement beau de renaître de ces cendres après un tel événement, un tel traumatisme, même si je pense que toute notre vie, il restera quelque chose de cet événement en nous, qui ne s'effacera jamais. Alors... Si on utilisait ce quelque chose pour justement grandir, évoluer, apprendre, ou produire? Ici, Fred Dewilde a décidé de renaître, et de dessiner cet album.

D'abord, nous avons le déroulé des événements.
Celui-ci, nous le connaissons par cœur. Nous l'avons répété, répété: que ce soit des images surgissant dans nos têtes même lorsque nous n'avons même pas vécu le drame, ou bien que ce soit les reportages à la télévision retraçant les étapes de cet attentat effroyable.
Mais au fond, qu'est-ce que cela nous apporte réellement? Alors qu'ici, nous avons la scène... du point de vue de quelqu'un qui l'a réellement vécu. Parce que nous avons beau, à la télévision, entendre le nombre de minutes et de secondes que le drame a duré, jamais nous pourrons les vivre de la même façon que l'ont vécus ceux qui étaient dans la salle du Bataclan ou sur les terrasses des cafés: parce que lorsque l'on vit un tel drame, notre notion du temps n'est plus du tout la même.
Mais aussi, notre notion de force et de peur. Avouons que ces derniers mois, nous nous sommes tous dis: "Et si c'était moi? Et si cela m'arrivait un jour? Alors comment vais-je réagir? Comment vais-je penser? Comment vais-je tenir?". Et vous auriez beau imaginer tous les scénarios possibles, nous ne pouvons jamais savoir comment allons nous réagir dans une telle situation.


"Avant, j'étais capable et je ne faisais pas. Maintenant, je fais parce que je sais que tomber ne sera pas pire que que j'ai déjà vécu. Parce que je crois en moi."

Ici, Fred Dewilde nous dessine, dans une première partie, les événements. Les événements comme il les a vécu. Ce à quoi il s'est accroché.

Et puis, dans une seconde partie, cette fois, Fred Dewilde raconte: il raconte l'après, ses traumatismes et leurs conséquences, ce qu'il aime encore plus et ce qu'il déteste à présent.

"Étrangement, j'ai le sentiment d'avoir eu plus peur après que pendant. Pendant, on est dans le vivre, la peur n'a plus sa place. La peur c'est la panique, la perte de contrôle, la mort. Je ne prétends pas ne pas avoir eu peur, je pense juste que l'adrénaline a contenu cette peur."

Je vous conseille cet album. Pour ne pas oublier. Et pour voir cette tragédie d'un autre point de vue, du vrai point de vue: celui de quelqu'un qui l'a malheureusement vécue.